Le Conseil de gouvernement marocain a approuvé jeudi dernier le projet de décret n° 2.23.716 fixant les qualifications requises pour l’exercice des fonctions de syndic ainsi que les honoraires correspondants dans le cadre des procédures de difficultés des entreprises. Cette initiative s’inscrit dans la poursuite de la mise en œuvre des dispositions du cinquième livre du Code de commerce. Elle vise à réduire les délais de traitement des dossiers, à renforcer la transparence et l’efficacité judiciaire, conformément à la feuille de route gouvernementale 2023-2026 pour l’amélioration du climat des affaires.
Mais ce projet suffira-t-il à initier un changement profond dans les procédures juridiques et judiciaires relatives aux entreprises en difficulté ? Répond-il véritablement aux exigences économiques nationales ou demeure-t-il une mesure technique limitée ?
Contexte national : des défis persistants dans les procédures de difficultés des entreprises
Malgré plusieurs réformes économiques et judiciaires, le Maroc continue de faire face à des obstacles majeurs dans la gestion des entreprises en difficulté financière ou administrative. Le retard dans le règlement des litiges et dans la prise de décisions judiciaires engendre des pertes considérables pour l’économie nationale et freine l’initiative entrepreneuriale.
La profession de syndic, pivot de ces procédures, souffre d’un manque de cadre clair et uniforme quant aux qualifications et aux rémunérations, soulevant ainsi des questions de compétence et de transparence. Le projet de décret revêt donc une importance stratégique en fixant des standards professionnels pour assurer la qualité et l’intégrité de cette fonction clé.
Comparaison internationale : enseignements tirés des expériences avancées
Des pays comme la France, l’Espagne et l’Algérie ont adopté des mécanismes sophistiqués pour la liquidation et la restructuration des entreprises. En France, par exemple, la profession de mandataire judiciaire est strictement régulée, garantissant compétence et impartialité, ce qui a permis de réduire les délais de procédure et de protéger les droits de toutes les parties. En Algérie, les récentes tentatives de réforme visent à alléger la bureaucratie et à renforcer le rôle judiciaire dans la sauvegarde des PME.
Le Maroc a-t-il su tirer profit de ces expériences ? Le projet actuel reflète-t-il une volonté d’adopter les meilleures pratiques internationales ou reste-t-il confiné à un cadre juridique restreint ?
Le défi majeur : entre texte légal et mise en œuvre pratique
L’obstacle principal demeure dans l’application effective de ces textes, notamment face aux interventions politiques qui peuvent compromettre l’indépendance des secteurs nécessitant une gestion professionnelle et transparente. Par ailleurs, la persistance de pratiques liées au népotisme et aux réseaux personnels freine les réformes profondes.
Ce projet pourra-t-il vraiment accélérer les procédures judiciaires et améliorer le climat des affaires ? Ou bien son efficacité sera-t-elle limitée par un manque de volonté politique et de ressources humaines qualifiées ?
Perspectives de réforme : vers une nouvelle dynamique
Ce décret pourrait constituer une étape clé pour consolider la justice commerciale au Maroc, à condition d’être accompagné d’une mise en œuvre rigoureuse, d’une formation continue des professionnels, et de critères stricts de transparence et de redevabilité. Ces mesures devraient s’inscrire dans une réforme globale du système judiciaire commercial, adaptée aux exigences du marché mondial.
Allons-nous bientôt assister à un ensemble de réformes majeures qui rétabliront la confiance dans le système judiciaire marocain et soutiendront les entreprises nationales face aux défis d’une économie globale en mutation ?