Dans un contexte national où les appels à la transparence dans la gestion des programmes sociaux se multiplient, la députée Fatima Tamni, du parti de la Fédération de la gauche démocratique, a adressé une question écrite au Chef du gouvernement Aziz Akhannouch, lui demandant des clarifications sur la nature des relations politiques et professionnelles qui le lient à la directrice de l’Agence nationale de soutien social, tout en exprimant ses inquiétudes quant à une éventuelle instrumentalisation politique de cette institution stratégique.
L’Agence nationale de soutien social, créée dans le cadre du chantier royal relatif à la généralisation de la protection sociale, gère une base de données massive et sensible contenant des informations sur des millions de ménages marocains bénéficiaires de programmes tels que Tayssir, Raméd ou encore le soutien aux veuves. Une telle concentration d’informations soulève de sérieuses questions sur la neutralité de cette institution et la protection de ses données contre tout usage à des fins électoralistes.
Des nominations opaques et des conflits d’intérêts ?
Au cœur de cette interpellation, Tamni soulève ce qu’elle décrit comme un « possible conflit d’intérêts », remettant en cause la transparence des nominations aux postes de responsabilité dans des structures publiques aussi sensibles. Cette situation relance le débat sur les critères de compétence et de mérite versus les logiques de loyauté et d’affinité politique dans l’accès aux hautes fonctions.
Si des liens professionnels ou politiques directs entre le Chef du gouvernement et la directrice de l’agence venaient à être confirmés, cela poserait une entorse aux principes de bonne gouvernance tels qu’énoncés dans la Constitution de 2011, notamment en matière d’égalité des chances et d’impartialité des institutions.
Quelles garanties pour les données personnelles ?
Un autre enjeu majeur concerne la sécurité et l’utilisation des données personnelles de millions de Marocains. Qui garantit que ces données ne soient pas mobilisées à des fins électorales, surtout dans les zones rurales ou précaires, où l’aide sociale représente parfois la seule source de subsistance ?
Les rapports de la CNDP (Commission Nationale de contrôle de la protection des Données à caractère Personnel) insistent régulièrement sur la nécessité d’un cadre légal renforcé pour protéger les citoyens contre tout usage abusif de leurs données personnelles. Le Maroc est-il aujourd’hui en mesure de respecter ces standards ?
Des questions urgentes à l’approche des prochaines élections
Ce débat intervient alors que le pays se prépare à de futures échéances électorales, rendant la question d’autant plus sensible. Il devient crucial de mettre en place des mécanismes institutionnels indépendants capables de garantir que les programmes sociaux restent à l’abri de toute manipulation politique, et cela dans un contexte où la confiance dans les responsables publics demeure fragile.
La Présidence du gouvernement répondra-t-elle à l’interpellation parlementaire avec des données claires et vérifiables ? Ou choisira-t-elle une nouvelle fois le silence ? Et surtout : sommes-nous face à un cas isolé ou à un symptôme révélateur d’un déséquilibre structurel dans la gouvernance du modèle social marocain ?