Dans une scène riche en significations politiques et organisationnelles, le Parti de la Justice et du Développement (PJD) a renouvelé sa confiance en Abdelilah Benkirane en tant que secrétaire général, lors de son neuvième congrès national, après que la majorité ait voté en sa faveur avec environ 70 % des voix valides.
Ce résultat soulève une question centrale : cette élection incarne-t-elle la continuité de l’esprit du parti ou un retour forcé à une figure symbolique faute d’alternatives crédibles ?
Détails du vote : majorité confortable ou absence de consensus ?
Selon les résultats officiels, Benkirane a obtenu 974 voix sur 1390 votes valides, devançant largement Idriss Azami (394 voix) et Abdellah Bouanou (42 voix seulement). Toutefois, il est essentiel de se demander :
Ce vote traduit-il un soutien total à la personne de Benkirane, ou bien est-il le fruit du manque de leadership alternatif crédible, après des années d’échecs électoraux et de divisions internes ?
Benkirane en tête dès la présélection : retour naturel ou choix par défaut ?
Avant le vote final, les résultats de la présélection avaient déjà montré Benkirane en tête avec 163 voix, devançant de justesse Azami, qui en avait obtenu 160.
Ce faible écart lors de la présélection n’était-il pas déjà un signe d’hésitation au sein du parti quant à la personne qui devrait diriger la prochaine étape ?
Après les retraits d’Abdelaziz El Omari, Abdellali Hamieddine et Jamaâ El Moatassim de la course au secrétariat général, la voie semblait dégagée pour Benkirane.
Un congrès sous le signe de la « défaite électorale » : reconstruction ou maquillage de l’échec ?
La tenue du neuvième congrès intervient après ce que des dirigeants du parti, notamment Abdellali Hamieddine, ont qualifié de « défaite électorale historique ».
Le renouvellement de la confiance en Benkirane est-il une tentative de reconstruire l’unité interne en vue des prochaines échéances électorales, ou s’agit-il d’un simple pari sur une figure historique faute d’autres solutions viables ?
Et surtout, quels sont les plans de Benkirane pour sortir le parti de son actuelle crise structurelle, à l’heure où la concurrence politique au Maroc se durcit ?
Lecture des résultats des autres candidats : déclin des nouvelles élites ?
Idriss Azami, président du comité préparatoire du congrès, n’a obtenu que 394 voix, malgré son rôle central. Abdellah Bouanou, chef du groupe parlementaire du parti, n’a recueilli que 42 voix.
Ce rejet relatif des nouvelles figures traduit-il un manque de confiance en leur capacité à diriger, ou bien un attachement nostalgique à l’ancienne génération dans un contexte d’absence de projet de renouveau clair ?
Benkirane et l’avenir du PJD : une renaissance possible ?
La question fondamentale demeure : Benkirane pourra-t-il ramener le PJD au-devant de la scène politique, comme il l’avait fait après 2011 ?
Ou bien les profondes mutations sociales, économiques et politiques rendent-elles toute répétition du passé impossible ?
Un contexte plus large : la crise des partis traditionnels et la culture du « leader éternel »
Le renouvellement de confiance en Benkirane ne constitue pas un cas isolé, mais s’inscrit dans une crise plus large des partis marocains, souvent incapables de renouveler leurs élites et dépendants de figures charismatiques.
Jusqu’à quand la scène politique marocaine restera-t-elle dominée par des figures historiques plutôt que par des institutions solides et démocratiques ?
Et le PJD pourra-t-il se réinventer pour répondre aux défis politiques et sociaux du prochain cycle électoral ?