La déclaration d’Abdellah Ferki, président de la Confédération marocaine des TPE, PME et auto-entrepreneurs, n’était pas une simple réaction technique au discours du Chef du gouvernement au Parlement. Elle s’apparente à un cri stratégique d’alerte, mettant en lumière une réalité structurelle : l’exclusion persistante de 98,4 % du tissu entrepreneurial national, qui pourtant assure plus de 83 % de l’emploi privé.
« Un discours qui ne nous concerne pas »… Réaction glaciale des acteurs de terrain
Le discours du Chef du gouvernement semble refléter une continuité dans les pratiques : le soutien public reste capté par un cercle restreint d’acteurs privilégiés, souvent proches du pouvoir, tandis que la majorité des TPE/PME croule sous les dettes, les prélèvements fiscaux et les pressions de la CNSS.
Le plus inquiétant ? La banalisation de ces inégalités au nom de la performance économique.
Un décret d’investissement à 12 milliards de dirhams… Pour qui vraiment ?
M. Ferki alerte sur un nouveau décret en discussion au Parlement. Officiellement destiné à stimuler l’investissement via une enveloppe de 12 milliards de dirhams, il serait en réalité conditionné par des critères d’éligibilité inaccessibles pour 98,4 % des entreprises marocaines.
Une sélection par exclusion, au profit de grandes entreprises déjà favorisées, semble ainsi se mettre en place, au mépris des principes d’équité territoriale et sociale.
Ce que révèle ce discours : au-delà des mots
Derrière les chiffres, une stratégie de marginalisation silencieuse semble se consolider. Alors que la loi prévoit une part de 20 % des marchés publics réservée aux TPE/PME, cette mesure reste inappliquée depuis des années. Pourquoi ? Où est le blocage ? Qui a intérêt à ce statu quo ?
De plus, les programmes comme Forsa ou Intilaka, loin de libérer les énergies entrepreneuriales, sont devenus pour beaucoup une source de surendettement et de vulnérabilité.
Une économie à deux vitesses, en chiffres
Avec un budget de 340 milliards de dirhams alloué à l’investissement public pour cette année, on pourrait s’attendre à un effet d’entraînement sur tout l’écosystème entrepreneurial. Or, la question centrale demeure : combien de TPE y auront réellement accès ?
Des questions que la politique doit affronter
-
Existe-t-il une véritable volonté politique de soutenir les TPE/PME marocaines ?
-
La révision des textes suffit-elle, ou faut-il repenser le contrat entre l’État et l’entreprise ?
-
À quand une politique d’inclusion économique authentique ?
-
Le Maroc peut-il continuer à ignorer 98,4 % de son potentiel entrepreneurial ?
Conclusion ouverte
Le message d’Abdellah Ferki n’est pas un simple cri de colère. Il constitue un acte citoyen de lucidité économique. C’est un appel à revoir d’urgence les priorités de la politique publique d’investissement, au risque de voir un pan entier du tissu économique national sombrer dans l’exclusion.
Faut-il attendre l’effondrement des plus petits pour agir ?