mardi, juin 17, 2025
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Sabratha s’embrase pendant l’Aïd : la « capitale de la traite humaine » va-t-elle devenir un foyer d’explosion régionale sous silence international et impuissance libyenne ?

Alors que les haut-parleurs des mosquées de la ville de Sabratha diffusaient les Takbîrât de l’Aïd al-Adha, le bruit des roquettes RPG est venu briser la joie des habitants, ramenant la ville à son image habituelle : des affrontements entre milices partageant l’influence, l’allégeance et les intérêts dans une région décrite depuis des années comme « le passage le plus dangereux vers l’Europe ».

Ce qui s’est produit du jeudi soir jusqu’à l’aube du vendredi à Sabratha, située à 70 km à l’ouest de la capitale libyenne Tripoli, n’était pas un simple échange de tirs entre hommes armés, mais bien le prolongement d’un conflit plus profond, révélateur de la fragilité de l’État libyen, et de la complicité de réseaux locaux, régionaux et internationaux dans l’économie de guerre et le trafic d’êtres humains.

Les milices impliquées, dont le groupe « Al-Omo » (dirigé par Ahmed Al-Dabbashi), ne sont plus de simples bandes incontrôlées, mais détiennent aujourd’hui un pouvoir réel. Elles sont accusées par des organisations internationales, telles que l’Organisation internationale pour les migrations et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, de diriger une partie d’un réseau international facilitant les passages illégaux vers l’Europe via ce qu’on appelle le « couloir libyen ».

Mais la question la plus importante demeure : pourquoi ces foyers continuent-ils à prospérer ? Et pourquoi ce dossier n’a-t-il pas été traité de manière radicale malgré la multiplication des rapports, qu’ils soient onusiens, régionaux ou relatifs aux droits humains, depuis des années ?

Des rapports internationaux, notamment ceux de Human Rights Watch et d’Amnesty International, indiquent que de nombreuses milices accusées de trafic humain entretiennent des relations non déclarées avec des entités sécuritaires ou politiques en Libye. Elles bénéficient parfois d’une complaisance de la part de certains États européens dans le cadre d’un troc immoral visant à « stopper le flux migratoire », même au détriment de la dignité humaine.

Et quel est le lien avec le Maroc ?

Le lien avec le contexte marocain est nécessaire, car des centaines de jeunes Marocains transitent par la Libye dans leur quête du rêve européen. De nombreux témoignages, recueillis par des organisations marocaines et internationales — notamment l’Organisation marocaine des droits humains — confirment que des migrants marocains ont été détenus et torturés dans des centres contrôlés par des passeurs dans l’ouest libyen, notamment à Sabratha, Zaouïa et Zouara.

Certains rapatriés ont même parlé d’une coopération indirecte entre des réseaux marocains et libyens coordonnant les opérations de trafic, exploitant la pauvreté et le désespoir dans les milieux précaires au Maroc, sans que les autorités marocaines ou libyennes n’ouvrent d’enquêtes officielles sur ces accusations graves.

Des questions qu’il ne faut pas ignorer :

  • Qui finance ces milices ? Reçoivent-elles un soutien ou une couverture d’entités officielles ?

  • Quelle est la position des autorités libyennes face à ce qui se passe ? Sont-elles impuissantes ou complices ?

  • Les intérêts de certaines puissances occidentales croisent-ils ceux de ces réseaux, afin de contrôler le « robinet migratoire » vers l’Europe ?

  • Pourquoi aucune enquête internationale transparente n’a été ouverte concernant les accusations de traite humaine via la Libye ?

  • Et quel rôle joue le Maroc dans la protection de ses citoyens contre ces trajets mortels ?

Un appel à l’ONU… mais !

Malgré l’appel de la représentante des Nations Unies, Hanna Tetteh, à préserver la « trêve fragile » et à privilégier le dialogue, ces appels semblent, à la lumière de la persistance de l’économie parallèle de la guerre, n’être que des tentatives de maquiller une réalité effondrée. Les déclarations des responsables libyens, civils et militaires, n’ont pas non plus abordé clairement la question de la reddition de comptes des milices impliquées.

Conclusion :

Ce qui se passe à Sabratha n’est pas un incident passager, mais une scène d’une tragédie jouée sur les ruines d’un État détruit, avec une jeunesse maghrébine perdue entre l’échec intérieur et l’illusion extérieure. La Libye a besoin de plus que de simples vœux de l’Aïd. Toute la région a besoin d’une politique humaine rigoureuse contre les réseaux de la mort… et non de simples déclarations diplomatiques édulcorées.

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