vendredi, juin 13, 2025
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La tragédie de Fès rouvre le dossier des médinas : faut-il qu’un toit s’effondre pour que l’alerte soit entendue ?

Dix morts et six blessés. Le bilan est lourd à Fès, où un immeuble s’est effondré dans le quartier El Hassani. Pourtant, les habitants savaient. Des ordres d’évacuation avaient été émis depuis des années, mais n’ont jamais été suivis d’effet. La question revient avec force : qui devait agir, et pourquoi ne l’a-t-il pas fait ?

Mais cette histoire dépasse les murs de Fès. De Rabat à Casablanca, de Tanger à Larache, des centaines de bâtiments anciens tiennent à peine debout. Leurs occupants vivent dans l’attente silencieuse d’un nouveau drame.

Dans les médinas, des rénovations… de façade seulement

À Rabat, des budgets importants ont été alloués à la rénovation de la médina et du quartier juif « Mellah », avec le soutien de bailleurs nationaux et internationaux. Le résultat ? Un coup de peinture aux entrées des ruelles. Mais à l’intérieur, rien ne change. Les structures restent fragiles, les murs fissurés, et les toits menacent.

Protège-t-on les habitants, ou se contente-t-on d’embellir pour les touristes ?
Et où est le suivi des fonds investis ?

L’alerte ne suffit pas

À Fès, les ordres d’évacuation ont été transmis. Mais sans solution de relogement, les familles sont restées. Résultat : un drame évitable devenu inévitable. Prévenir ne suffit pas : il faut décider, accompagner, et surtout agir.

Restauration ou démolition : l’absence d’une vision claire

L’expert en urbanisme Ahmed Talhi distingue trois cas :

  • Les bâtiments à valeur historique : à consolider, puis à restaurer.

  • Les structures fissurées : à évacuer d’urgence et à analyser techniquement.

  • Les immeubles irrécupérables : à démolir et à reconstruire.

Mais les municipalités appliquent-elles ces principes ? À quel moment commence la responsabilité de l’État ? Et jusqu’où va-t-elle ?

Rénovation : qui doit payer ?

Pour l’architecte Malika Benjdid El Aaroussi, l’État ne peut assumer seul le coût des restaurations. Elle propose une contribution des propriétaires.

Mais la réalité est complexe. Beaucoup d’entre eux vivent dans la précarité.

Peut-on vraiment leur demander de financer des travaux aussi lourds ?
Existe-t-il un mécanisme équitable de répartition des coûts ?

Reloger : solution temporaire ou déracinement durable ?

Des programmes de relogement existent, mais ils sont lents, insuffisants, et souvent mal ciblés. Derrière le mot “relogement” se cache parfois un processus de déplacement irréversible.

Les catastrophes servent-elles parfois de prétexte pour vider les médinas à des fins spéculatives ?
Et où est la justice territoriale dans la planification urbaine ?

Conclusion : après Fès, quelle suite ?

La tragédie de Fès n’est pas un accident isolé, mais le fruit de décisions reportées, de projets sans suivi, et de politiques sans stratégie.

Chaque médina au Maroc abrite sa propre bombe à retardement. Il est temps de changer de cap : avec une vision claire, des responsabilités définies et un calendrier contraignant.

Des questions à poser – aux décideurs comme aux citoyens :

  • Qui décide d’intervenir ?

  • Qui contrôle l’exécution des projets de rénovation ?

  • Quel rôle pour les habitants ?

  • Existe-t-il une stratégie nationale de sauvegarde des médinas, au-delà du simple vernis esthétique ?

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