Le Conseil national du Parti de l’Authenticité et de la Modernité (PAM), réuni lors de sa trentième session, a annoncé le retour du député Hicham El Mehajri au bureau politique, après plus d’une année de gel de son adhésion. Cette décision a été perçue dans les cercles internes comme une tentative de restauration d’un des visages parlementaires les plus critiques au sein de la majorité. Pour El Mehajri lui-même, cela représente une preuve supplémentaire que le PAM est un « théâtre de dialogue et de démocratie, et non une caserne militaire ».
Cette décision, annoncée par Fatima-Zahra Mansouri, coordinatrice de la direction collégiale du parti, ne peut être dissociée du contexte général que traverse le PAM depuis son entrée au gouvernement. Selon plusieurs observateurs, elle reflète un retour à un certain équilibre entre discipline partisane et liberté d’expression au sein de la formation politique. La nomination du député Adel Bitar au bureau politique va également dans ce sens, en introduisant un équilibre entre compétences de terrain et profils organisationnels en vue des prochaines échéances électorales.
El Mehajri : « Une victoire de la démocratie avant d’être la mienne »
Dans sa première déclaration à « Assahifa », Hicham El Mehajri a affirmé que son retour est « une preuve supplémentaire que le PAM porte dans son ADN la démocratie, le dialogue et l’ouverture ». Il a souligné que la proposition de sa réintégration, malgré les divergences passées avec certaines composantes du parti, a été faite de manière démocratique, exprimant ainsi la vitalité de l’institution partisane et la pluralité des opinions en son sein.
Il a ajouté que cette décision « n’est pas une victoire personnelle », mais plutôt une victoire pour la culture d’écoute et de participation qui caractérise le parti, ainsi que pour sa capacité à surmonter les tensions dans une logique collective respectueuse des statuts internes, de la constitution et de l’esprit de la différence.
« Comme je me suis plié aux décisions du parti dans le passé, malgré nos désaccords, je m’y conforme aujourd’hui aussi. Notre parti n’est pas une caserne militaire, mais un large espace de dialogue, d’accueil de toutes les opinions, ce qui constitue sa véritable force », a-t-il affirmé à « Assahifa ».
Du gel au retour… Un parcours sinueux dans le contexte de la majorité
Le retour d’Hicham El Mehajri au bureau politique remet au centre des débats l’un des dossiers les plus controversés au sein du PAM depuis son intégration dans la majorité gouvernementale. Cela remonte à son intervention virulente lors des discussions autour du projet de loi de finances 2023, au cours de laquelle il avait critiqué les politiques économiques et sociales du gouvernement, provoquant une onde de choc considérée comme une violation manifeste de la charte de la majorité.
Suite à cela, le bureau politique avait décidé de geler son adhésion et de transmettre son dossier à la Commission d’arbitrage et d’éthique, estimant qu’il avait porté atteinte aux principes du parti et aux alliances conclues avec les autres composantes de la majorité, selon un communiqué officiel publié à l’époque.
En novembre 2022, El Mehajri avait également présenté sa démission de la présidence de la Commission de l’Intérieur à la Chambre des représentants, déclarant que « ce poste revient au parti, et puisque le parti ne veut plus de moi, je ne peux pas m’y accrocher », ce qui témoignait alors d’une volonté d’éviter la confrontation frontale avec la direction.
Cependant, avec son retour progressif aux activités du parti depuis janvier dernier, notamment à travers sa participation à une rencontre avec les composantes du PAM dans la région Marrakech-Safi, les signes de rapprochement avec la direction ont commencé à apparaître, préparant le terrain à un retour politique en douceur, dans une forme de réconciliation silencieuse.
Le PAM réorganise ses rangs internes
Le retour de Hicham El Mehajri à la direction du parti envoie un double message. D’une part, il témoigne de la volonté du PAM d’absorber les divergences sans exploser de l’intérieur, surtout à l’approche des élections. D’autre part, il reflète la capacité de l’homme politique à adapter son discours aux impératifs de la conjoncture, sans pour autant renier totalement son indépendance critique.
De nombreux cadres du parti s’accordent à dire qu’El Mehajri, bien qu’il ait parfois dévié de la ligne stricte de discipline, a toujours été présent dans la mémoire organisationnelle comme une voix audacieuse de contrôle parlementaire, notamment à travers son rôle actif dans le suivi des politiques publiques. Il a souvent attiré l’attention de l’opinion publique sur des dossiers à forte charge sociale.
Son retour ne se limite donc pas à un règlement de compte personnel, mais incarne, selon plusieurs observateurs, une dynamique organisationnelle au sein du PAM visant à renforcer la cohésion interne dans un contexte national marqué par des mutations politiques et électorales délicates. Ce retour confirme aussi que le parti, malgré la sévérité de certaines décisions passées, reste ouvert à ses membres, offrant des opportunités de réintégration dans une logique d’intérêt général et de respect institutionnel.
Le retour de Hicham El Mehajri ne semble pas être un événement passager dans l’agenda du parti. Il constitue un signe tangible d’une possible coexistence entre engagement partisan et ouverture d’esprit, entre franchise politique et discipline organisationnelle – une équation difficile, mais qui, si elle réussit, pourrait jeter les bases d’un modèle partisan capable de se régénérer de l’intérieur sans perdre sa rigueur politique.