vendredi, juin 13, 2025
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La diaspora marocaine : le trésor négligé dans la bataille de la diplomatie économique et la nouvelle vision royale

À une époque où les défis géopolitiques se croisent avec les mutations économiques mondiales, et où les enjeux de souveraineté et de développement deviennent de plus en plus cruciaux, le Maroc émerge comme un pays qui cherche, avec lucidité et progressivité, à se repositionner sur la carte des relations internationales, en misant sur de nouveaux outils diplomatiques, notamment la diplomatie économique et le renforcement du rôle de la diaspora marocaine comme levier stratégique.

Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, lors de sa dernière intervention devant la Chambre des représentants, ne s’est pas contenté d’énumérer les réalisations, mais a dessiné les contours d’une vision plus large : transformer la politique étrangère marocaine d’une simple représentation traditionnelle en une plateforme économique et commerciale au service du développement national et de la souveraineté décisionnelle.

Mais que signifie réellement la « diplomatie économique » dans le contexte marocain ? Sommes-nous face à une transformation profonde de la doctrine diplomatique du Royaume, ou seulement à une extension des sphères d’influence sans réelle restructuration ?

De la représentation diplomatique à la médiation économique

L’annonce par Bourita de la création d’une Direction générale de la diplomatie économique, et de la nomination d’attachés économiques dans plusieurs ambassades, reflète une conviction croissante au sein de l’appareil officiel : les relations internationales ne se gèrent plus uniquement par des communiqués et des positions, mais par les intérêts, les affaires, la capacité des États à défendre leurs produits, attirer les investissements, et structurer des partenariats gagnant-gagnant.

Cette orientation est en phase avec une vision royale annoncée depuis plusieurs années, notamment à travers des visites en Afrique et la signature de dizaines d’accords Sud-Sud. Mais une question se pose : disposons-nous des structures institutionnelles, des ressources humaines qualifiées, et des mécanismes de coordination entre ministères de souveraineté et acteurs économiques pour concrétiser cette vision ?

La diaspora marocaine : des “transferts financiers” à une “puissance douce stratégique”

Le discours du ministre sur les Marocains du monde, dont les transferts dépassent 100 milliards de dirhams par an, révèle une contradiction frappante : cette communauté constitue un pilier financier majeur, mais reste marginalisée dans les politiques publiques liées à l’investissement et à la décision économique.

Seulement 10 % de ces transferts sont orientés vers des projets d’investissement ! Ce paradoxe soulève une question urgente : qu’est-ce qui empêche ces compétences et capitaux d’être de véritables partenaires dans l’économie nationale ? Est-ce la bureaucratie ? Le manque de confiance ? L’absence de dispositifs d’accompagnement ? Ou bien un déficit de volonté politique sérieuse pour redéfinir la relation avec cette frange de citoyens ?

La Fondation Mohammedienne pour les Marocains du monde : début de changement ou nouvelle façade ?

L’annonce de la “Fondation Mohammedienne pour les Marocains du monde” s’inscrit dans une tentative de proposer un nouveau modèle d’encadrement de la diaspora, mais la réussite de cette initiative dépend de plusieurs conditions :

  • Définir clairement ses compétences et ses relations avec les autres institutions,

  • Impliquer les membres de la diaspora dans la conception et la gestion de cette instance,

  • Encadrer son fonctionnement par un dispositif juridique garantissant sa pérennité et sa bonne gouvernance.

Le véritable enjeu aujourd’hui n’est pas seulement de créer de nouvelles institutions, mais de restaurer la confiance perdue entre les Marocains de l’étranger et les institutions nationales, à travers la transparence, la sécurité juridique, et la célérité des procédures.

Les victoires silencieuses du Maroc : une vision royale face aux contraintes

Loin du tumulte médiatique, le Maroc peut revendiquer certaines avancées stratégiques :

  • Consolidation de la stabilité institutionnelle dans un environnement régional fragile,

  • Diversification des partenariats économiques au-delà du cadre européen classique,

  • Développement d’un réseau diplomatique à vocation économique et commerciale.

Mais ces succès restent fragiles tant qu’ils ne sont pas soutenus par des réformes internes des institutions en charge des affaires migratoires et de l’investissement, et tant que la diaspora marocaine n’est pas valorisée comme force de proposition et d’action, au lieu d’être réduite à un simple “portefeuille”.

Conclusion :

Bâtir une diplomatie économique forte et renforcer le rôle de la diaspora marocaine dans les enjeux nationaux n’est pas un luxe politique, mais une nécessité stratégique pour un pays qui aspire à peser dans les équations africaines et internationales.

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