lundi, juillet 28, 2025
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« Du juge au ministre… quand l’affaire Mahdaoui devient le miroir d’un conflit plus profond »

🔹 Lecture analytique des déclarations du ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, à propos de l’affaire Hamid El Mahdaoui : entre règlement de comptes personnel et fragilité de l’État de droit ?

Dans une interview accordée au site Hespress, le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi s’est exprimé sur le jugement rendu contre le journaliste Hamid El Mahdaoui, condamné en appel à un an et demi de prison et à une amende de 150 millions de centimes pour diffamation.

Mais au lieu d’adopter la retenue qu’impose sa fonction ou de commenter la portée institutionnelle de cette affaire très sensible, le ministre a livré une réponse étonnamment émotionnelle, truffée de griefs personnels. Il a évoqué des blessures morales, des offenses à sa famille, et une tentative de « négociation » qu’il résume par la formule : « la terre contre la paix » — allusion troublante qui donne à penser que la liberté d’un média aurait pu être échangée contre une forme d’allégeance.

Loin de recentrer le débat sur les principes du droit à la critique dans une démocratie, Ouahbi s’est positionné comme une partie lésée, affirmant que Mahdaoui l’a « insulté », « calomnié », et « n’a jamais présenté ses excuses ». Il ajoute : « Pourquoi devrais-je renoncer ? Il avait qu’à m’appeler pour demander pardon… »

Une posture qui soulève des questions majeures :

  • Un ministre de la Justice peut-il se présenter comme victime personnelle d’un journaliste tout en étant, institutionnellement, le garant des droits de ce même journaliste à la critique ?

  • Le fait de plaider pour une sanction lourde et de rejeter explicitement toute possibilité de clémence n’est-il pas en contradiction avec l’idéal d’indépendance de la justice ?

  • Comment interpréter cette confusion entre l’espace privé et la fonction publique ? Et surtout, que signifie ce glissement de terrain lorsqu’il s’agit de la liberté de la presse ?

Ouahbi va plus loin encore, en affirmant que « les journalistes pensent avoir tous les droits : insulter, calomnier, mentir… et invoquer la liberté de la presse comme bouclier ». Il balaie ainsi d’un revers de main l’essence même de la mission journalistique critique, en l’associant à la « fabrique de crimes ».

Cette logique punitive, habillée d’un discours de victime, donne à voir un ministre fragilisé par la critique mais disposant du pouvoir de la faire payer au prix fort. La question n’est plus seulement judiciaire : elle devient profondément politique. Car si le recours à la justice se transforme en règlement de comptes, c’est tout l’édifice de l’État de droit qui vacille.

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