Dans un contexte mêlant enjeux économiques, sociaux et politiques, le dossier de la raffinerie marocaine « Samir » continue de symboliser un échec stratégique majeur. Alors que les appels à sa relance se multiplient, le gouvernement dirigé par Aziz Akhannouch persiste dans son mutisme, ignorant les bénéfices évidents d’une reprise de l’activité pour l’économie et la souveraineté énergétique du pays.
Plus de 25 milliards de dirhams de devises étrangères perdues chaque année : gaspillage programmé ?
Le Front national pour le sauvetage de la Samir estime que la remise en marche de la raffinerie permettrait d’économiser annuellement plus de 25 milliards de dirhams en devises, représentant une part importante des importations nationales de produits pétroliers raffinés. Dans un Maroc qui dépend à plus de 90 % des marchés extérieurs pour ses besoins énergétiques, la poursuite de l’arrêt de Samir accentue la vulnérabilité économique, creuse le déficit commercial et aggrave la dépendance stratégique.
4 500 emplois entre attente et précarité
Plus de 4 500 emplois directs et indirects pourraient être générés par la relance de la raffinerie. Depuis son arrêt brutal en 2015, des milliers de familles sont plongées dans l’incertitude. Le redémarrage de Samir ne bénéficierait pas seulement aux salariés, mais revitaliserait également l’économie locale de Mohammedia, profondément affectée par la paralysie du site.
L’arbitrage international : argument juridique ou écran de fumée ?
Le gouvernement invoque un litige d’arbitrage international pour justifier son inaction, un argument que de nombreux observateurs jugent peu convaincant. Pour plusieurs voix critiques, il ne s’agit là que d’un prétexte pour protéger des intérêts privés dominants dans le secteur, renforçant l’emprise des lobbies pétroliers qui tirent profit de la situation actuelle.
Libéralisation des prix : un choc social
La libéralisation des prix des carburants, sans mécanismes réels de régulation, a entraîné une flambée des prix. Le front affirme que les marges de profit dans le secteur ont explosé, avec un cumul de 80 milliards de dirhams de bénéfices pour les opérateurs depuis 2016. Cette dynamique nuit gravement au pouvoir d’achat des citoyens et contribue à l’exaspération sociale.
Des amendes symboliques et un oligopole renforcé
Malgré les sanctions imposées par le Conseil de la concurrence à neuf sociétés de distribution, les pratiques anticoncurrentielles persistent. Les marges par tonne ont été multipliées par quatre, passant de 600 à plus de 2 500 dirhams. Ces sanctions insuffisantes ont paradoxalement consolidé la position des géants du secteur.
Les alternatives de relance : des solutions écartées sans justification
Depuis 2018, le Front propose plusieurs scénarios de relance : rachat par l’État, gestion autonome, ou ouverture du capital au public via une souscription nationale. Toutes ces options sont restées lettre morte, révélant un blocage politique davantage qu’un empêchement juridique.
Conclusion : entre inertie politique et impératif national
La poursuite de l’inaction dans ce dossier stratégique sert-elle uniquement une minorité influente ? Le Maroc a besoin aujourd’hui de décisions courageuses pour assurer sa souveraineté énergétique, soutenir son tissu industriel et offrir des perspectives concrètes d’emploi. Construire l’avenir énergétique du pays ne peut reposer uniquement sur l’importation et l’accumulation des marges privées. Il doit s’appuyer sur une vision industrielle forte et sur l’investissement dans les capacités nationales.
Le gouvernement Akhannouch osera-t-il franchir le pas ? Ou continuera-t-il à laisser s’effondrer une infrastructure stratégique, au détriment de l’intérêt général ? La réponse se joue dans les semaines à venir.