jeudi, juillet 10, 2025
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Vol d’eau et d’électricité au Maroc : Qui vole les ressources en temps de sécheresse ?

Alors que plusieurs régions du Maroc souffrent d’une pénurie aiguë d’eau potable, des enquêtes de terrain menées par des commissions d’inspection relevant de l’administration territoriale dans les régions de Casablanca-Settat et Marrakech-Safi ont révélé un système bien enraciné de détournement des ressources hydriques et électriques, impliquant des élus locaux, des entrepreneurs et des personnalités influentes.

Ces investigations, engagées en application d’une circulaire du ministre de l’Intérieur Abdelouafi Laftit, ont mis au jour des pratiques illégales d’exploitation de puits clandestins, de branchements sauvages et de constructions non autorisées, notamment dans les zones périurbaines de Casablanca.

Qui décide ? Qui protège ? Qui se tait ?

Selon des sources bien informées, plusieurs élus et entrepreneurs se sont précipités pour démonter leurs installations de pompage illégal dès l’annonce de la descente des inspecteurs. Ce réflexe illustre le sentiment d’impunité et les soupçons de protection administrative ou politique accordée à ces activités illicites.

Des rapports préliminaires rédigés par les autorités locales font état d’un nombre alarmant de puits non autorisés et de forages réalisés en toute illégalité, souvent avec la complicité ou le silence de certains agents d’autorité.

Qui profite du pillage ?

Les bénéficiaires de ces détournements sont identifiés : usines clandestines, dépôts de matériaux de construction, unités de production de briques, souvent possédés par des élus ou leurs proches. Ces installations, protégées de toute intervention des autorités, approvisionnent des chantiers de construction illégale qui échappent à toute réglementation.

La population, quant à elle, subit les conséquences : raréfaction de l’eau, augmentation des factures, insécurité environnementale. Un déséquilibre flagrant dans l’accès aux ressources qui met en péril les principes d’équité territoriale.

Complicités politiques et urbanisme sauvage

Les enquêtes visent désormais plusieurs présidents de communes et leurs adjoints, particulièrement ceux détenant des délégations dans le domaine de l’urbanisme. Ils sont soupçonnés de faciliter ou de fermer les yeux sur des opérations de branchements illégaux, de forage non autorisé, et de constructions anarchiques, souvent dans des zones à usage industriel ou agricole.

Des rapports des caïds et chefs de subdivisions administratives suggèrent que des élus vendent eux-mêmes du matériel de construction aux projets illégaux, tout en bénéficiant de l’ombre protectrice de figures influentes.

Circulaire ministérielle : L’intention est là, mais l’action ?

La circulaire n°1937 du ministère de l’Intérieur ordonne une série de mesures d’urgence pour contenir la situation critique des bassins hydriques, notamment :

  • la création des comités prévus par la loi 36.15 relative à l’eau,

  • l’interdiction d’arrosage des espaces verts avec de l’eau potable,

  • la limitation des prélèvements en eau souterraine et de surface,

  • la distribution d’eau via des citernes dans les zones rurales touchées par la sécheresse.

Mais l’exécution de ces mesures se heurte à la réalité d’un système où ceux chargés d’appliquer la loi en sont parfois les premiers contrevenants.

Un signal fort… mais sera-t-il suivi d’effet ?

Le wali de la région Casablanca-Settat, Mohamed Mhidia, a adressé des instructions strictes aux gouverneurs des provinces périphériques pour suspendre l’approvisionnement en eau et électricité de plusieurs unités industrielles illégales, y compris certaines propriétés d’élus.

Ces mesures, bien qu’encourageantes, seront-elles suffisantes pour briser l’architecture d’un pillage institutionnalisé ? Ou se heurteront-elles à la résistance des réseaux d’influence et à l’inertie administrative ?

Conclusion : Une gouvernance sous pression

À l’heure où le Maroc est confronté à une crise hydrique structurelle, le scandale du vol de l’eau et de l’électricité ne peut plus être traité comme une série d’infractions isolées, mais doit être compris comme le symptôme d’un échec de gouvernance.

Il ne s’agit pas simplement de sanctionner des contrevenants, mais de repenser la gestion territoriale des ressources, rétablir la confiance des citoyens, et garantir l’égalité devant la loi.

Sommes-nous à l’aube d’un tournant vers une justice environnementale réelle ?
Ou ces enquêtes resteront-elles des éclats sans lendemain dans le tumulte du clientélisme local ?

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