vendredi, juin 13, 2025
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Quand le ciel devient politique : Qui gouverne l’agriculture au Maroc, la pluie ou la décision ?

Une fois de plus, la pluie s’invite au cœur du débat officiel sur la situation agricole au Maroc. Et une fois de plus, l’optimisme renaît avec les premières gouttes, comme si chaque saison pluvieuse effaçait les lacunes structurelles d’un modèle agricole fragilisé. Mais jusqu’à quand allons-nous continuer à suspendre notre sécurité alimentaire aux caprices du ciel ?

Le ministre de l’Agriculture, Ahmed Bouri, a évoqué un « saison agricole contrastée », marquée par des pluies précoces, une sécheresse prolongée, puis un retour partiel des précipitations à partir de mars. Des pluies qui ont amélioré la couverture végétale, soutenu le cheptel et permis une meilleure performance des cultures d’automne et de printemps.

Des signes encourageants, certes. Mais peut-on continuer à s’en remettre à la météo alors que le monde avance avec la technologie, la recherche et les politiques durables ?

Une politique agricole encore soumise à l’humeur du climat ?

Selon les chiffres avancés par le ministre, la superficie céréalière cultivée atteint 3,2 millions d’hectares, pour une production estimée à 44 millions de quintaux — une hausse de 41 % par rapport à la saison précédente. Mais que signifient ces chiffres s’ils restent dépendants du hasard climatique et non d’une planification stratégique ?

Parmi les mesures présentées : la distribution de 740 000 quintaux de semences sélectionnées, la subvention de 1,34 million de quintaux d’engrais, et l’assurance agricole couvrant à peine 661 000 hectares, soit 66 % des superficies prévues.

Des questions persistent :

  • Pourquoi la couverture assurantielle n’a-t-elle pas été généralisée malgré les années successives de sécheresse ?

  • Où sont les résultats des projets de dessalement et de valorisation des eaux usées, pourtant largement financés ?

  • Quelle place réelle est accordée aux petits agriculteurs dans cette équation ?

Pour une agriculture de résilience, pas d’espérance

Le Maroc a besoin d’un véritable virage stratégique : une agriculture résiliente, intelligente, équitable et créatrice d’emplois. L’urgence n’est pas de « réagir aux saisons », mais d’anticiper, d’investir dans la recherche, de renforcer les chaînes de valeur et d’industrialiser l’agriculture.

Les rapports de la FAO et de la Banque mondiale sont clairs : sans une rupture dans la gouvernance agricole, les disparités territoriales vont s’aggraver, et la souveraineté alimentaire restera une chimère.

Une agriculture qui fait germer l’espoir, pas seulement les céréales

Les pluies peuvent améliorer une saison, mais seules des décisions courageuses peuvent transformer un modèle. Le Maroc ne doit pas attendre que le ciel décide à sa place.

La véritable réforme agricole commence sur terre : par la planification, la justice hydrique, la confiance en la science et la volonté politique de rompre avec l’attentisme.

Alors, sommes-nous prêts à faire de l’agriculture un pilier rationnel du développement, ou continuerons-nous à regarder le ciel pour expliquer nos échecs ?

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