mardi, juin 17, 2025
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« La survie des peuples dirigée comme une Coupe du Monde ? Lecture critique d’une publication sur l’insécurité alimentaire dans le monde musulman »

Dans une longue publication sur Facebook, qui a suscité de nombreuses réactions, Ayoub Redouani, conseiller en politiques publiques et chercheur en géopolitique et économie politique, dresse un diagnostic sans appel de la situation du monde arabo-musulman à travers un seul prisme, mais central : la nourriture et la souveraineté alimentaire.

Bien que le texte soit rédigé sur un ton parfois sarcastique, parfois indigné, il reflète une inquiétude grandissante face à l’absence de politiques durables en matière de sécurité alimentaire, notamment dans les pays du Sud.

En tant que média, nous nous contentons ici d’analyser cette prise de position – que nous ne revendiquons pas – en la replaçant dans son contexte et en éclairant le lecteur par des questionnements journalistiques, sans verser dans l’adhésion aveugle.

Un constat alarmant : beaucoup d’États, peu de vision

Redouani interroge l’inefficacité des pays musulmans – plus de 56 au total – à garantir leur autonomie alimentaire, alors même qu’ils disposent de ressources naturelles et humaines considérables.

Il lance cette phrase provocante :

« A-t-on jamais entendu parler d’un Salon agricole au Caire ou d’une stratégie verte en Somalie ? »

Derrière l’ironie se cache une vraie problématique :
Pourquoi la souveraineté alimentaire n’est-elle pas une priorité politique ?
Pourquoi tant de pays à potentiel agricole restent-ils dépendants des importations de céréales, de sucre, ou même de lait ?

Les indicateurs internationaux comme ceux de la FAO ou de l’Indice Global de Sécurité Alimentaire (GFSI) montrent un net recul des pays arabes sur leur capacité à nourrir leurs populations de façon stable et abordable.

Le cas du Maroc : des pauvres ciblés, mais pas impliqués

Dans sa publication, Redouani consacre une large place au Maroc, décrivant une situation où les marchés de produits de base (sardine, oignon, pomme de terre, viande, etc.) sont livrés à des logiques spéculatives.

Même si certaines formules peuvent paraître populistes, la substance de ses propos rejoint une interrogation légitime :

  • Où sont les mécanismes de régulation du marché ?

  • Pourquoi l’État semble-t-il s’effacer devant les cartels agricoles ou les monopoles de distribution ?

  • Comment expliquer que le Maroc exporte ses produits agricoles tout en en interdisant l’accès à ses propres citoyens par des prix exorbitants ?

Ce déséquilibre traduit une absence de politique de justice économique, où l’État devrait jouer un rôle d’arbitre et non de spectateur.

CAN vs Aid Al-Adha : le choc des priorités ?

L’un des passages les plus frappants de la publication est cette comparaison entre l’annulation implicite du rite du sacrifice pour de nombreux Marocains et les moyens déployés pour accueillir la Coupe d’Afrique des Nations 2025.

Certes, la comparaison semble exagérée. Mais elle soulève un débat de fond :

Le Maroc investit-il plus dans son image extérieure que dans sa cohésion sociale intérieure ?
Une victoire footballistique peut-elle compenser le vide laissé par une baisse du pouvoir d’achat ou une précarité alimentaire croissante ?

En profondeur : on ne combat pas la faim avec des slogans

La question centrale posée par Redouani, sous une forme provocante, est pourtant cruciale :

« Qui contrôle la nourriture, et qui contrôle ceux qui la contrôlent ? »

Sans démantèlement des circuits rentiers de l’agroalimentaire, sans politiques d’encadrement strictes, sans soutien à la production locale et à la consommation locale, les États du Sud resteront à la merci des marchés mondiaux.

Conclusion : au journalisme de poser les bonnes questions

Au-delà des formules à l’emporte-pièce, le texte d’Ayoub Redouani agit comme un catalyseur. Il pousse les journalistes et les citoyens à se réapproprier un sujet fondamental : manger à sa faim, chez soi, en dignité.

  • La nourriture est-elle devenue un privilège ?

  • Pourquoi le citoyen n’est-il plus qu’un consommateur sans pouvoir de négociation ?

  • Le modèle actuel est-il soutenable à moyen terme ?

Autant de questions qui ne trouveront pas réponse dans les campagnes de communication ni dans les compétitions sportives, mais bien dans les souks, les villages, et les foyers qui peinent à remplir leurs assiettes.

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