samedi, juin 7, 2025
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Rabat : Pourquoi le rapport de la Cour régionale des comptes reste-t-il absent ? Arrestations, opacité et inquiétudes autour de la gouvernance locale

Au moment où s’élèvent les appels à renforcer la transparence et à lier la responsabilité à la reddition des comptes, l’absence persistante du rapport de la Cour régionale des comptes de Rabat-Salé-Kénitra des sessions du Conseil communal de Rabat, depuis plus d’un an, soulève plus d’une question sur le sort d’un document de contrôle censé être au cœur du débat public local.
Pourquoi la commune tarde-t-elle à activer les dispositions de la loi organique 113.14, qui oblige les présidents de communes à présenter les rapports des cours régionales des comptes devant les sessions du conseil ? Et cette absence troublante du rapport est-elle liée à son contenu, dont certaines parties ont commencé à fuiter dans les médias, ou bien y a-t-il une volonté politique de repousser l’affrontement avec des données lourdes susceptibles d’ébranler des figures administratives et organisationnelles influentes dans la capitale ?

Flou de la maire… et protestation de l’opposition
Une question légitime a été adressée par le groupe du Parti de la justice et du développement au Conseil communal de Rabat à la maire de la capitale, Fatiha El Moudni, membre de la majorité gouvernementale, demandant : « Quelle est la situation légale du rapport final, et a-t-il été officiellement remis à la commune ? »
Il ne s’agit pas seulement d’une interrogation technique, mais d’un indice clair sur la montée du doute quant à une possible volonté de dissimuler des informations susceptibles de nuire à la crédibilité de la gestion communale ou de révéler des irrégularités dans la gestion des ressources.

Ce qui est remarquable, c’est que l’opposition fait le lien entre le retard de publication du rapport et les informations qui fuient progressivement dans les médias, posant ainsi la problématique de l’opacité et de la sélectivité dans la présentation des données, et relançant le débat sur le droit d’accès à l’information, tel que stipulé dans l’article 27 de la Constitution marocaine, ainsi que dans la loi n° 31.13 relative au droit d’accès à l’information.

Des arrestations rouvrent une plaie dans le corps communal
Le contexte ne se limite pas à un rapport non encore présenté, mais s’étend à des développements plus graves : des arrestations et suspensions ont touché plusieurs responsables et fonctionnaires de la commune, sur la base d’éléments préliminaires suggérant leur implication dans des marchés publics douteux.
Et bien que ces responsables aient été libérés sous caution et soient actuellement poursuivis en liberté, le silence de la maire et l’hésitation de la majorité à éclairer l’opinion publique ne font qu’accentuer les soupçons.

Des questions essentielles s’imposent ici : pourquoi la commune, par la voix de sa maire, n’a-t-elle pas tenu une conférence de presse pour apporter les explications nécessaires ?
S’agit-il de mesures de précaution pour préserver la réputation du conseil, ou bien cela cache-t-il une volonté de protéger certaines personnes potentiellement impliquées dans des dossiers complexes de gestion ?

Une transparence attendue face à une réalité opaque
La situation actuelle ouvre la voie à une nécessaire interpellation des institutions élues sur leurs engagements envers les citoyens, non seulement en matière de gestion des ressources humaines et financières, mais aussi concernant l’application des principes de bonne gouvernance, identifiés par des rapports nationaux précédents – notamment ceux de la Cour des comptes – comme étant au cœur de la réforme de l’administration publique.

Selon un rapport publié par l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption pour l’année 2023, « la faiblesse de l’activation des mécanismes de contrôle interne et le retard dans le traitement des rapports des instances de contrôle contribuent au maintien des manifestations de corruption et de mauvaise gestion dans les institutions publiques et les collectivités territoriales ».
C’est ce qui fait du cas de la commune de Rabat un exemple vivant de ce dysfonctionnement structurel.

Et après ?
Face à ces faits, des interrogations s’imposent avec insistance :
Le ministère de l’Intérieur interviendra-t-il pour activer les mécanismes de suivi et d’évaluation afin de garantir la mise en œuvre des rapports des cours régionales des comptes ?
Quelle est la place du citoyen dans l’équation de la transparence, si les rapports de contrôle restent enfermés dans les tiroirs et fuitent de manière sélective ?
Comment peut-on restaurer la confiance dans l’institution communale si les principes de responsabilité et de clarté ne sont pas appliqués ?

L’absence de clarté, l’accumulation de soupçons de corruption dans les marchés publics, et l’invisibilisation des outils de contrôle institutionnels sont autant d’éléments qui confirment le besoin urgent d’une révision en profondeur du fonctionnement des conseils élus, afin que le slogan de la « régionalisation avancée » ne soit pas qu’une façade formelle pour des pratiques non démocratiques.

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