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De Marseille, Benali esquisse l’ambition du Maroc : devenir une puissance régionale de l’énergie et des minerais

Un pari royal dans un monde en crise énergétique

Dans une allocution à forte portée stratégique, Leila Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, a affirmé que le Maroc progresse résolument vers son ambition de devenir un hub régional pour les énergies renouvelables et la valorisation des chaînes de valeur liées aux minerais stratégiques.

Cette déclaration a été faite lors de sa participation, mardi, à la 4e édition du Forum Europe-Afrique, organisé à Marseille sous le thème « Innover ensemble », et placé sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et du Président de la République française.

Mais derrière cette visibilité diplomatique et technique se pose une question cruciale : le Maroc dispose-t-il aujourd’hui des leviers réels de souveraineté énergétique et minérale pour conduire une transformation régionale significative ?

20 ans d’investissement : où en est-on réellement ?

La ministre a souligné que le Maroc a investi massivement ces deux dernières décennies dans les infrastructures énergétiques, lui permettant de produire de l’électricité renouvelable à un coût compétitif – inférieur au tiers du prix de l’électricité d’origine nucléaire en Europe.

Mais malgré ces avancées technologiques, la question de l’autonomie énergétique demeure ouverte : dans quelle mesure le Royaume a-t-il réduit sa dépendance aux énergies fossiles importées ? Et quelles vulnérabilités persistent face aux chocs géopolitiques et à la volatilité des marchés internationaux ?

Hydrogène vert : ambition réaliste ou pari risqué ?

La ministre a insisté sur les atouts du Maroc en matière de production d’hydrogène vert, de méthanol et d’ammoniac thermiques. Elle a évoqué la possibilité d’approvisionner les flottes maritimes internationales avec des carburants propres à des prix plus compétitifs que le gaz naturel liquéfié.

Toutefois, l’expérience internationale montre que le développement de l’hydrogène vert nécessite des investissements colossaux, un transfert technologique sophistiqué et une coordination institutionnelle rigoureuse. Le Maroc possède-t-il véritablement ces conditions réunies ? Dispose-t-il d’une stratégie d’accès structurée aux marchés européens ou asiatiques ?

De l’énergie aux minerais : le pari de la « super-région »

L’un des aspects novateurs du discours ministériel réside dans le lien établi entre transition énergétique et développement de la chaîne de valeur minérale, dans le cadre d’une « super-région » allant du Kazakhstan à l’Afrique du Sud, en passant par le Maroc.

Cette vision s’inscrit dans un contexte mondial marqué par une compétition acharnée autour des minerais stratégiques – lithium, cobalt, terres rares – devenus essentiels à la transition verte. Mais dans quelle mesure le Maroc peut-il s’imposer comme un acteur clé de cette équation géoéconomique, malgré des ressources limitées comparées aux géants miniers ?

Une ambition africaine au cœur des chaînes de valeur mondiales

Au-delà des enjeux technologiques, le discours de Benali traduit une volonté politique plus large : celle d’un Maroc qui se positionne comme un trait d’union entre l’Europe et l’Afrique, en s’appuyant sur l’intégration régionale à travers des projets structurants dans l’énergie et les minerais.

Cette ambition rejoint les nouvelles dynamiques euro-africaines, dans un contexte où l’Europe cherche des alternatives fiables au gaz russe et aux minerais chinois. Mais cette orientation annonce-t-elle réellement une transformation productive nationale basée sur l’innovation et la souveraineté industrielle, ou reste-t-elle tributaire des investissements étrangers ?

Conclusion : un discours audacieux, un chantier complexe

Le Forum de Marseille a permis au Maroc de mettre en avant ses progrès dans des secteurs devenus le nerf de la guerre économique mondiale. Mais pour transformer ce discours en levier réel d’influence régionale, il faudra plus que des annonces : des politiques industrielles cohérentes, des partenariats équilibrés, et une gouvernance à la hauteur des défis.

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