Dans une atmosphère mêlant art, diplomatie culturelle et ouverture régionale, les cinémas d’Arabie Saoudite s’apprêtent à accueillir le long-métrage marocain « Pour l’amour de Touda » du réalisateur Nabil Ayouch, à partir du 8 mai 2025. Un avant-première exceptionnelle est prévue à Reel Cinema à Riyad, le mercredi 7 mai, marquant un moment fort du rapprochement artistique arabo-maghrébin.
De Cannes à Riyad : l’itinéraire d’un film sur la femme et la ruralité marocaines
Sélectionné au prestigieux Festival de Cannes et candidat du Maroc aux Oscars 2025 dans la catégorie du meilleur film international, ce drame poignant retrace l’histoire de Touda, une femme à la fois vulnérable et déterminée, rêvant de devenir « cheikha » (chanteuse populaire). Interprétée magistralement par Nisrine Erradi, Touda lutte pour sa survie dans un village marocain, travaillant la nuit dans des bars pour offrir un avenir à son fils, avant de tenter sa chance à Casablanca, la ville de toutes les espérances.
Le film brosse le portrait d’un Maroc invisible et rarement mis en lumière, soulevant des questions sociales profondes : La femme rurale peut-elle briser les carcans traditionnels ? La ville est-elle vraiment une promesse d’émancipation ou un mirage ?
Un simple film… ou un acte de diplomatie culturelle ?
Cette projection en Arabie Saoudite dépasse le cadre du divertissement. Elle intervient dans un contexte où le royaume saoudien investit massivement dans la culture et les industries créatives, conformément à sa Vision 2030. Pour le Maroc, c’est une opportunité stratégique d’étendre son rayonnement culturel et de renforcer ses liens symboliques avec le Golfe, non pas par les armes ou les traités, mais par le cinéma et l’émotion partagée.
Sommes-nous à l’aube d’un nouvel axe culturel Rabat-Riyad ?
Le Golfe est-il prêt à accueillir des récits maghrébins intimistes et engagés ?
Siham Faydhi : une distributrice marocaine en orbite arabe
Derrière cette présence marocaine en Arabie se trouve Siham Faydhi, fondatrice de Concept Mena, entreprise pionnière dans la distribution de films marocains et arabes. À travers cette initiative, elle réaffirme la place des femmes marocaines dans l’écosystème cinématographique et leur rôle dans l’internationalisation du 7e art maghrébin.
Succès populaire et reconnaissance internationale
Avec plus de 50 000 spectateurs dans les salles marocaines, le film a déjà prouvé son écho local. Son parcours dans les festivals, de Marrakech à Cannes, confirme qu’il s’agit d’une œuvre capable de toucher un public universel, sans renier ses racines.
Nabil Ayouch, connu pour ses engagements artistiques forts, a déclaré à ce propos :
« Représenter notre pays sur la scène internationale est une grande fierté. Ce film est une fenêtre ouverte sur notre réalité, notre culture et notre humanité. »
Le cinéma : un nouveau pont entre les peuples ?
À l’heure où les tensions géopolitiques persistent dans le monde arabe, la culture semble offrir des alternatives concrètes pour retisser les liens. « Pour l’amour de Touda », en s’invitant à Riyad, pose une question plus large :
Le cinéma peut-il devenir un vecteur de dialogue entre Maghreb et Golfe ?
L’art est-il en passe de supplanter la politique dans la construction d’un avenir arabe commun ?