Dans sa dernière déclaration, le bâtonnier Abdel Rahim Al-Jami a lancé un avertissement sévère concernant les changements inclus dans le projet de loi sur le code de procédure pénale, qu’il considère comme un recul dangereux pour le système judiciaire au Maroc. Si ce projet représente un pas vers la modernisation législative, Al-Jami estime que certaines modifications compromettent les acquis du droit pénal au royaume. Quels sont les véritables enjeux de ces avertissements ? Et quelles questions devons-nous poser sur l’avenir judiciaire du Maroc ?
Recul des acquis juridiques : un pas en arrière ?
Le bâtonnier Al-Jami a déclaré que « la justice est le destin d’une nation », soulignant que les changements inclus dans le projet, bien qu’ils comportent des nouveautés légales, représentent pour certains un véritable recul des droits humains, en particulier l’article 83 qui annule l’enquête obligatoire dans les crimes graves. Selon Al-Jami, cet article constitue un recul par rapport à un des acquis de la justice marocaine inscrit dans la loi de 1959.
Cette question soulève un point fondamental : devons-nous revenir sur des mécanismes qui étaient considérés comme des garanties essentielles pour garantir la justice ? Et si l’article 83 abrogeait ce principe historique, quel sera l’impact sur un procès équitable au Maroc ? Est-ce une avancée dans la bonne direction ou un pas en arrière ?
Affaiblissement de l’indépendance de la justice : qui contrôle les enquêtes ?
Les déclarations d’Al-Jami abordent également la question du renforcement du rôle du parquet, qui, selon le projet de loi, disposerait du pouvoir de transférer une affaire de l’enquête judiciaire au tribunal sans passer par un juge d’instruction. L’article 91 accorde également au procureur général le droit de demander le retrait d’un dossier d’enquête du tribunal. Cette situation pose des questions sur l’indépendance judiciaire et le rôle du parquet dans le système de justice pénale.
Cela pourrait-il conduire à une domination de l’exécutif sur le judiciaire ? Et quelles seraient les conséquences de cette concentration de pouvoirs entre les mains du parquet pour les droits de la défense et l’indépendance des juridictions ? Si le parquet bénéficie de telles prérogatives, qu’en serait-il si des abus ou pressions politiques intervenaient dans ces affaires ?
Réduction du rôle de la défense : le droit de défendre est-il menacé ?
Un autre point saillant des déclarations d’Al-Jami concerne la réduction du rôle de la défense dans les premières étapes de l’enquête, notamment durant la garde à vue. Peut-on imaginer que le citoyen, dans cette situation, n’ait pas besoin d’une assistance juridique ? Ou que l’avocat ne soit pas nécessaire lors de l’enquête préliminaire ?
Al-Jami s’interroge également sur le fait de réduire le rôle de la défense dans l’enquête judiciaire : La réduction de la présence des avocats à ces étapes cruciales constitue-t-elle une menace pour le droit à une défense équitable ? Est-ce une avancée ou une régression pour la justice marocaine ? Peut-on vraiment imaginer un système judiciaire qui prive les accusés de leur droit à une représentation légale pleine et entière ?
Le secret de l’enquête : garantie ou contrainte ?
L’une des questions sensibles abordées par Al-Jami concerne le secret de l’enquête. Bien que le secret soit une garantie fondamentale pour protéger l’intégrité des investigations, le bâtonnier a souligné qu’il ne faut pas que ce secret soit utilisé pour exclure la défense.
Le principe de transparence sera-t-il respecté dans les enquêtes ? Et, si certaines étapes de l’enquête sont cachées, est-ce un prétexte pour des pratiques qui risquent de nuire à la justice ?
Une crise de confiance entre le pouvoir exécutif et législatif ?
Al-Jami a également critiqué la réduction du rôle du parlement dans la définition des politiques pénales. Le Maroc fait-il face à une crise de confiance entre les institutions législatives et exécutives ? Et quelles sont les implications de la marginalisation du parlement dans le processus législatif ? Comment le législatif peut-il récupérer son pouvoir pour définir des politiques pénales tout en garantissant les droits des citoyens ?
Quel rôle pour les juges dans ce contexte ?
Enfin, Al-Jami a appelé à écouter la voix des juges, qu’il considère comme les « chevaliers des tribunaux ». Est-ce que les juges auront un rôle plus important dans l’influence sur le projet de loi sur le code de procédure pénale ? Ou vont-ils devenir de simples exécutants des décisions sans réelle capacité d’impact ?
Conclusion : Où en sommes-nous dans la protection des droits de l’homme ?
Dans le contexte global, il semble que le projet de loi sur le code de procédure pénale, malgré ses orientations modernes, reflète un profond conflit sur le rôle de la justice et les droits humains au Maroc. Devons-nous renoncer à certains acquis pour moderniser le système judiciaire ? Ou des réformes réelles sont-elles possibles pour renforcer la justice et protéger les droits des accusés ? Les réponses à ces questions détermineront la véritable nature des réformes législatives au Maroc.