Lors d’une séance de questions orales à la Chambre des représentants, Nadia Fettah, ministre de l’Économie et des Finances, a choisi d’affronter directement les critiques concernant la hausse des prix des biens de consommation et la faiblesse des pensions. Son intervention ne se limite pas à un simple réquisitoire défensif : elle ouvre une fenêtre sur la pensée économique du gouvernement marocain dans un contexte de défis multiples : inflation, spéculation et crises mondiales successives.
La cherté de la vie entre réalité et gestion gouvernementale
Fettah a affirmé que le gouvernement ne « s’est pas caché derrière les crises », insistant sur le fait que les mesures gouvernementales visent à protéger le pouvoir d’achat des citoyens, à travers le soutien à l’électricité et au transport, ainsi que la réduction de certaines taxes. Mais elle ne s’est pas contentée des chiffres officiels : elle a replacé la crise dans un cadre global, rappelant que l’inflation nationale a atteint 1,1 % jusqu’en août 2025 après un pic de 13 %, tandis que l’inflation mondiale a dépassé 4 %.
Ici se pose la question centrale : le simple rattachement de la crise aux facteurs extérieurs suffit-il à apaiser la pression ressentie par le citoyen ? Les données officielles sur la baisse des prix de certains produits reflètent-elles la réalité quotidienne ou offrent-elles une image partielle d’une crise plus profonde sur le marché marocain ?
Les pensions : reconnaissance de la faiblesse de leur valeur
Dans un aveu presque surprenant, la ministre a reconnu la « faible couverture sociale », notamment pour les retraités de la CNSS. Près de 19 % des retraités du secteur privé perçoivent une pension inférieure au minimum légal, un indicateur de la fragilité du système social marocain.
Cette situation soulève une question majeure : une augmentation partielle de 5 % des pensions suffit-elle à calmer le mécontentement social, ou un véritable réformage structurel est-il nécessaire pour restaurer la dignité des retraités ?
Le soutien social direct : transparence ou défis méthodologiques ?
Fettah a également présenté les chiffres du soutien social direct, passant de 2,6 millions de foyers bénéficiaires en janvier 2024 à près de 4,9 millions aujourd’hui, avec un taux de refus mensuel ne dépassant pas 1,3 %. À première vue, le gouvernement promeut un modèle de contrôle numérique et de transparence institutionnelle, mais la réalité sociale pose d’autres interrogations : comment garantir que le soutien parvienne aux foyers les plus vulnérables, notamment dans les zones rurales ? La méthodologie numérique peut-elle réellement pallier les complexités sociales réelles ou se limite-t-elle à un outil statistique pour embellir la réalité ?
Stratégies futures : promesse ou vision réalisable ?
La ministre n’a pas seulement abordé le présent, elle a esquissé des programmes stratégiques à long terme : sécurité alimentaire, approvisionnement en eau pour l’agriculture, réduction du coût de l’énergie. Cette vision globale semble ambitieuse, mais soulève des questions ouvertes : le gouvernement peut-il réaliser ces programmes sans conflits politiques, financiers ou institutionnels ? Le citoyen marocain percevra-t-il une amélioration concrète avant plusieurs années ?
Conclusion : lecture approfondie du discours gouvernemental
Les déclarations de Nadia Fettah révèlent un dilemme double : officiellement, le gouvernement se présente comme un acteur conscient et producteur de solutions ; socialement, le citoyen subit directement la hausse des prix et la faiblesse des pensions. L’analyse approfondie montre que les chiffres officiels et les politiques gouvernementales ne coïncident pas toujours avec la perception réelle des individus, transformant chaque déclaration politique en matière de réflexion : jusqu’où le discours gouvernemental peut-il combler le fossé entre réalité et perception populaire ?
Questions ouvertes pour le lecteur :
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Les justifications gouvernementales de l’inflation mondiale suffisent-elles à expliquer la hausse des prix locaux ?
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Une réforme partielle des pensions est-elle suffisante pour garantir la justice sociale, ou s’agit-il seulement d’un « pansement temporaire » ?
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La méthodologie numérique du soutien social peut-elle remplacer les défis concrets de terrain ?
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Comment le citoyen ordinaire peut-il évaluer la crédibilité du gouvernement entre statistiques officielles et expérience quotidienne ?
Le discours de Nadia Fettah dépasse la simple séance parlementaire : il constitue un miroir des politiques économiques marocaines et de leurs défis profonds, et une clé pour comprendre comment le gouvernement gère le pouvoir d’achat dans un contexte mondial complexe.



