Mobilisation professionnelle, revendications légitimes et enjeux de gouvernance dans une dynamique nationale de réforme
Dans un contexte marqué par des mutations profondes du système de santé marocain, les assistants techniques et administratifs relevant du ministère de la Santé et de la Protection sociale montent progressivement en visibilité. L’organisation, le 16 juin 2025 à Rabat, d’une réunion élargie du Bureau national du Syndicat indépendant des secteurs de la santé, en présence d’un nombre important de professionnels de cette catégorie, en témoigne.
Mais cette réunion, au-delà de son caractère purement organisationnel, soulève une série d’interrogations structurelles sur la place réelle de cette catégorie dans l’architecture sanitaire nationale. Assiste-t-on à un tournant vers la reconnaissance d’un maillon longtemps marginalisé du système ? Ou s’agit-il d’une nouvelle séquence dans la longue histoire des revendications sociales reportées ?
Une mobilisation tardive mais stratégique : pourquoi maintenant ?
Longtemps absents des espaces de dialogue sectoriel, les assistants techniques et administratifs ont vu leurs revendications reléguées au second plan, malgré leur rôle central dans le bon fonctionnement des établissements de santé, à tous les niveaux. Ce réveil collectif est-il une réponse aux nouvelles orientations des politiques publiques, ou bien une réaction à un trop-plein d’injustices accumulées ?
Des revendications structurées et mesurées : vers une équité de traitement ?
Les propositions issues de cette réunion – allant de la régularisation des promotions et mutations, à la révision des quotas et conditions d’accès aux grades supérieurs, ou encore à la création de nouveaux échelons professionnels – traduisent une volonté de convergence vers un traitement plus juste, aligné sur les standards appliqués aux autres catégories.
Mais la question reste entière : ces recommandations seront-elles intégrées à l’agenda gouvernemental ? Ou faudra-t-il encore lutter pour faire reconnaître des droits pourtant fondamentaux à la dignité et à la progression de carrière ?
La gouvernance du système de santé à l’épreuve de l’équité professionnelle
La réforme des Groupements Sanitaires Territoriaux (GST), instaurée par la loi 08.22, introduit une nouvelle vision décentralisée de la gestion sanitaire. Or, l’avenir de cette catégorie dépendra aussi de sa capacité à être représentée dans les conseils d’administration de ces GST. Les textes réglementaires à venir intégreront-ils enfin cette dimension ? Et de quelle manière l’articulation entre réforme administrative et valorisation des ressources humaines pourra-t-elle se concrétiser ?
Une lecture sociale et politique des revendications professionnelles
Au-delà des demandes techniques, c’est toute une philosophie de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique qui est interrogée : comment rééquilibrer les rapports de reconnaissance entre professions de santé ? Quelles garanties d’équité et de transparence peut-on offrir à ceux dont les tâches, bien que souvent invisibles, sont indispensables ?
Et surtout : à quel moment le système reconnaîtra-t-il que les réformes ne peuvent réussir sans l’adhésion et la motivation de tous ses acteurs, quel que soit leur grade ou fonction ?
Conclusion : une réforme réussie passe aussi par la justice interne
La dynamique actuelle autour des assistants techniques et administratifs est l’un des nombreux tests pour la réforme du système de santé marocain. L’ouverture du chantier du statut de ces professionnels, la promesse d’une gouvernance plus inclusive, et l’ambition d’une meilleure structuration des carrières sont autant de signaux d’espoir… à condition qu’ils se traduisent par des actes.
Car tout projet de réforme nationale, aussi ambitieux soit-il, ne peut s’affranchir d’un principe fondamental : la reconnaissance équitable de toutes les forces vives du système.