Dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes, les États-Unis ont déclenché un nouveau cycle de conflit commercial en imposant de nouveaux droits de douane à l’ensemble de leurs partenaires, au premier rang desquels la Chine. Cette décision n’est pas passée inaperçue : Pékin, qui ne tolère plus la politique de « pression maximale », a réagi avec une vigueur inhabituelle, qualifiant ces mesures de « violation flagrante des règles de l’OMC et de coup dur pour la stabilité économique mondiale ».
Mais assistons-nous aujourd’hui à un simple « différend tarifaire » ? Ou s’agit-il d’une redéfinition des rapports de force économiques sur les ruines de l’ordre commercial mondial né après la Seconde Guerre mondiale ?
Escalade ou stratégie préméditée ?
Le communiqué chinois, daté du 5 avril 2025, utilise un ton direct et peu diplomatique, accusant Washington d’utiliser les tarifs douaniers comme une arme pour imposer son hégémonie, en privilégiant ses intérêts nationaux au détriment de ceux de la communauté internationale.
Mais la véritable question est la suivante : les États-Unis agissent-ils par crainte de l’ascension chinoise ? Ou sommes-nous face à une remise en question plus profonde de leur rôle dans l’économie mondiale ?
Ces dernières années, la Chine a renforcé sa position en tant que pôle économique alternatif. Son produit intérieur brut a dépassé 130 000 milliards de yuans en 2024, avec une croissance de 5 %, malgré le ralentissement global. Elle s’impose aujourd’hui non seulement comme la deuxième économie mondiale, mais aussi comme un acteur central de la stabilité commerciale internationale.
De la défense à l’offensive : la Chine dépasse la « diplomatie réactive »
Le communiqué affirme : « La Chine ne cherche pas les ennuis, mais elle ne les craint pas », un message clair : Pékin ne restera pas les bras croisés face à l’escalade américaine. Sa réponse ne se limite pas à la condamnation ; elle inclut la promesse de prendre des « mesures fermes » pour protéger sa souveraineté et ses intérêts économiques.
Mais de quelles mesures s’agit-il ? Pékin imposera-t-elle des droits de rétorsion similaires ? Ou utilisera-t-elle d’autres leviers, comme la restriction des exportations de terres rares ou l’accélération de son recentrage économique ?
De l’OMC à l’ombre d’un effondrement global
L’Organisation mondiale du commerce, longtemps garante des litiges commerciaux, semble aujourd’hui impuissante face à cette montée des tensions. Le communiqué dénonce l’unilatéralisme de Washington, qui affaiblit non seulement les règles de l’OMC, mais aussi tout le concept du multilatéralisme économique.
Assistons-nous au début de l’effondrement de l’ordre commercial multilatéral ?
Existe-t-il une alternative crédible à ce système ? Ou allons-nous vers une anarchie économique mondiale ?
« America First » face à la mondialisation
La politique actuelle de Washington repose sur le principe de « America First ». Pour la Chine, cela équivaut à imposer une « exception américaine » à l’ordre mondial, avec un retour au paradigme de « la force au-dessus du droit ».
En contrepoint, Pékin se présente comme défenseur de la mondialisation et de l’ouverture, affirmant que la coopération et le bénéfice mutuel sont les seuls chemins vers le progrès humain. Tandis que les États-Unis cherchent à réduire leur dépendance aux chaînes d’approvisionnement mondiales, la Chine renforce ses partenariats Sud-Sud et promeut son initiative « la Ceinture et la Route ».
Du préjudice partagé à la logique du « jeu à somme nulle »
Les guerres commerciales ne font aucun gagnant — un constat partagé par les économistes de l’Est comme de l’Ouest. Mais la logique du « jeu à somme nulle » appliquée aujourd’hui par Washington semble cacher des ambitions politiques bien plus profondes.
Les États-Unis cherchent-ils à freiner l’ascension de la Chine, même au prix d’un effondrement du système mondial qu’ils ont eux-mêmes contribué à bâtir ?
Dans un monde marqué par des mutations majeures — guerre en Ukraine, crises énergétiques, émergence des BRICS+ —, les politiques américaines paraissent plus conflictuelles que jamais.
Conclusion : qui portera le flambeau de l’avenir ?
Le communiqué chinois se conclut par une phrase symbolique : « Éteindre la lumière des autres ne rendra pas la vôtre plus brillante ». Tout est dit : il s’agit d’un affrontement entre ceux qui veulent bâtir un monde basé sur le partenariat, et ceux qui tiennent à préserver une domination unipolaire.
Mais l’histoire, rappelle la Chine, ne recule pas. Et un monde déjà saturé de crises ne pourra peut-être pas supporter une nouvelle guerre des géants.
