Lorsque Fouzi Lekjaa, ministre délégué chargé du budget et président de la Fédération royale marocaine de football, s’exprime sur le coût des stades et le développement lié à la Coupe du Monde, il ne s’agit pas d’une simple déclaration gouvernementale traditionnelle. En quelques minutes, son discours croise politique, économie, sport et plans de développement à long terme, dévoilant une image du Maroc cherchant à réaliser un changement stratégique global, de l’infrastructure à la santé publique.
Lekjaa déclare : « Pourquoi boycotter Hakimi ? Hakimi est né à Ksar El Kebir, il a mangé la bissara avec Simo. » Dans cette phrase simple, il y a bien plus qu’une défense d’un joueur. Il s’agit d’envoyer plusieurs messages : sur l’appartenance locale, sur la reconnaissance des sacrifices quotidiens et sur le refus des approches circonstancielles ou sélectives qui tentent de marginaliser certains joueurs. Le sport aujourd’hui se limite-t-il à la performance sur le terrain, ou reflète-t-il des zones de pouvoir social et politique au Maroc ?
Lekjaa insiste sur le fait que l’organisation de la Coupe du Monde n’est pas seulement un projet sportif, mais le « reflet d’une vision stratégique de notre pays », créant une valeur ajoutée, des opportunités de croissance et stimulant l’emploi. Mais le sport à lui seul peut-il faire avancer le développement national ? Ou est-il devenu un outil symbolique pour mesurer la capacité de l’État à exécuter des projets complexes, dépassant les limites du terrain pour toucher toutes les sphères de la société ?
Le ministre relie les grands matchs à l’investissement dans la santé et les infrastructures : des stades aux hôpitaux universitaires, du développement des aéroports au renforcement des services de santé, tous ces projets s’accélèrent grâce à la pression de la Coupe du Monde. Ici émerge la question fondamentale : ces projets auraient-ils été réalisés sans les échéances imposées par un événement mondial ? Et la société mérite-t-elle que des millions de dirhams soient investis pour accélérer leur mise en œuvre, même si le Maroc n’accueille pas effectivement la Coupe du Monde ?
Lekjaa précise que « le coût de construction des stades ne relève pas du budget général », révélant que le coût total lié à la Coupe du Monde s’élève à environ 3 milliards de dirhams, dont 1,6 milliard pour l’Office national des chemins de fer. De ce point de vue, la Coupe du Monde n’est pas simplement un événement footballistique ; c’est un projet de développement économique et social complet, reliant le nord au sud et l’est à l’ouest, dans ce que le Maroc appelle « 2030 ».
En même temps, Lekjaa aborde les rumeurs et les doutes sur les capacités du Maroc, parlant du « complot lié aux chiens errants et aux images falsifiées ». Ici se pose une question importante : pourquoi le sport se transforme-t-il en terrain de conspirations imaginaires ? La tentative de remise en question par des acteurs externes à la scène sportive de la compétence de l’État reflète-t-elle une crise de confiance ou un jeu politique complexe ?
En fin de compte, le discours de Lekjaa invite à la réflexion : le développement n’est pas un projet temporaire lié à la Coupe du Monde, mais un processus intégré visant tous les secteurs, en priorité la santé et les infrastructures. C’est un appel à revoir les priorités de l’État et à comprendre que le sport, lorsqu’il croise l’économie et la politique, devient un miroir de la société, reflétant ses ambitions, ses conflits et ses défis.
Le lecteur est invité à méditer : le Maroc 2030 peut-il se réaliser sans événements majeurs comme la Coupe du Monde ? Quel est le coût social et politique de l’investissement dans des projets accélérés ? Et le sport devient-il une plateforme pour renforcer le développement national ou simplement un outil symbolique de contrôle et d’influence ?



