Quand un parlementaire rompt le silence, ses mots deviennent un message.
La récente déclaration d’Ahmed Touizi, chef du groupe parlementaire du Parti Authenticité et Modernité (PAM), n’est pas une simple mise au point linguistique. Elle s’inscrit dans un moment politique calculé, où chaque mot semble pesé avec soin.
Pourquoi, après plusieurs semaines de silence, Touizi choisit-il de reparler maintenant ?
Est-ce une tentative de clore un dossier embarrassant pour le gouvernement ? Ou bien une stratégie pour rediriger le débat vers le vrai sujet : la corruption du système de subvention de la farine ?
Pour plusieurs observateurs, le timing n’est pas anodin. Le chef du groupe du PAM — allié central du Rassemblement National des Indépendants (RNI) — semble vouloir réaffirmer son autonomie politique, au moment où des tensions internes agitent la majorité. Ses propos sur des “lobbies dangereux pour la démocratie” n’ont pas été prononcés par un opposant, mais par un acteur clé du pouvoir.
Le message est donc double : “Je ne me rétracte pas, je précise.”
Derrière le “métaphore” du papier et de la farine, se cache une vérité économique amère :
un système d’aides publiques qui coûte plus de 16,8 milliards de dirhams par an, et dont certains acteurs profitent sans scrupules.
Touizi, en choisissant la voie de la nuance, ne retire rien à la gravité de ses accusations : il ne parle pas de papier dans la farine, mais de factures gonflées, de quotas détournés, et de profits illégitimes.
Cette prise de parole tardive ressemble à une sirène politique : un signal lancé autant à l’opinion publique qu’à ses partenaires gouvernementaux. Il dit, en substance : “Je sais ce qui se passe, et je ne me tairai pas.”
Dans un contexte où la confiance citoyenne s’effrite, cette posture pourrait être perçue comme une tentative de se repositionner avant les prochaines échéances électorales.
Reste une question essentielle : Touizi cherche-t-il à protéger son parti avant une recomposition politique inévitable, ou à dénoncer une dérive systémique qui menace la démocratie économique ? Dans tous les cas, son intervention a déplacé le débat : ce qui est “moulu” aujourd’hui, ce ne sont ni les grains ni les papiers, mais bien les frontières entre le discours politique et la vérité nue.



