mardi, décembre 2, 2025
AccueilActualitésSoixante jours pour changer le visage du Grand Maghreb : Washington met...

Soixante jours pour changer le visage du Grand Maghreb : Washington met à l’épreuve la réconciliation impossible entre le Maroc et l’Algérie

À l’heure où les cartes du Moyen-Orient se redessinent à une vitesse vertigineuse, l’apparition de Steve Witkoff, émissaire de l’ancien président américain Donald Trump, aux côtés de Jared Kushner, sur la chaîne CBS, a provoqué la surprise. Leur annonce ? Un accord de paix entre le Maroc et l’Algérie d’ici soixante jours.

Mais s’agit-il d’une simple initiative héritée de la diplomatie transactionnelle de Trump, ou du signe avant-coureur d’un changement profond dans la stratégie américaine en Afrique du Nord ?

Le choix du moment n’est pas anodin. Au lendemain du cessez-le-feu à Gaza, Witkoff évoque un « contagion de la paix ». Une formule chargée de symboles : la paix, après des décennies de rivalités, deviendrait-elle réellement contagieuse ?

Nous entrons dans une phase où les relations se reconfigurent au gré de nouvelles équations régionales, alors que Washington tente de renforcer son empreinte dans un espace historiquement perçu comme zone d’influence européenne, voire française.

Cette déclaration s’inscrit dans un contexte précis : le Conseil de sécurité s’apprête à examiner, fin octobre, un projet de résolution américain sur le Sahara marocain, décrit comme « le plus audacieux depuis quarante ans ».

Le texte prévoit un calendrier clair, fixant janvier 2026 comme échéance pour parvenir à une solution politique définitive, basée sur le plan d’autonomie marocain — présenté comme la voie la plus réaliste et crédible — tout en maintenant le principe d’autodétermination dans une formule conciliant légalité internationale et pragmatisme diplomatique. La correspondance temporelle entre ce calendrier et les « 60 jours » annoncés par Witkoff n’a rien d’un hasard : les deux discours se répondent et tracent la même direction.

Ainsi, l’Amérique ne se contente plus d’observer — elle recompose l’architecture des équilibres régionaux.
Les propos de Mossad Boulos, conseiller présidentiel, depuis Charm el-Cheikh, sur l’ouverture prochaine d’un consulat américain dans le Sahara marocain — affirmant clairement que « c’est le Sahara marocain » — confirment cette orientation : la politique américaine ne tolère plus l’ambiguïté.

Washington rejoint ainsi Paris et Londres, qui considèrent l’initiative marocaine comme la base la plus crédible de règlement.

Quant à Madrid, elle persiste dans une diplomatie d’équilibriste, oscillant entre le soutien affirmé à Rabat depuis 2022 et la prudence face à Alger.

Nous assistons à une nouvelle équation euro-méditerranéenne, plus réaliste, mais désormais sous regard américain.

Derrière cette dynamique, une question demeure : Trump cherche-t-il, par ses hommes, à imprimer sa marque sur le futur maghrébin ? Le débat dépasse la simple géopolitique pour toucher à une volonté régionale de redéfinir la “désescalade”.

Depuis la rupture des relations en 2021, le silence entre Rabat et Alger semblait figé. Mais les allusions de Witkoff à des canaux diplomatiques discrets ravivent l’idée d’un rapprochement en gestation. Faut-il y voir le prélude d’une vraie réconciliation, ou une pause stratégique sous pilotage américain ?

Ce qui se joue peut ressembler à une version maghrébine des Accords d’Abraham, mais sans Israël en vitrine. Ici, les protagonistes sont deux nations sœurs, unies par la géographie, séparées par la mémoire.

D’où les questions essentielles : La paix se décrète-t-elle ou se construit-elle ? Les États-Unis peuvent-ils imposer leur logique à un conflit dont les racines plongent dans l’histoire plus que dans la politique ?

Et le Sahara marocain deviendra-t-il, enfin, le point de départ d’un nouvel équilibre maghrébin ?

Entre les mots de Witkoff, les annonces de Boulos et les débats du Conseil de sécurité, la région semble à l’aube d’un tournant rare : soit la naissance d’une véritable réconciliation, soit un nouveau chapitre de “paix négociée” à l’américaine.

Dans les deux cas, une interrogation demeure : qui façonnera l’avenir du Grand Maghreb — la géographie ou la géopolitique ?

Articles connexes

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

- Advertisment -spot_imgspot_imgspot_imgspot_img

Les plus lus

Recent Comments