Dans les travées du Parlement marocain, des sièges vides commencent à devenir une image familière. Loin d’être des incidents isolés, les absences récurrentes de plusieurs députés posent une question dérangeante : s’agit-il simplement d’un manque de discipline individuelle, ou sommes-nous face à une crise structurelle plus profonde du système représentatif marocain ?
Derrière les discours sur la démocratie participative et la moralisation de la vie publique, une réalité persiste : de nombreux parlementaires brillent par leur absence, même lors des séances de vote sur des lois majeures ou de contrôle de l’action gouvernementale. Pire encore, certains groupes parlementaires n’ont pas tenu une seule réunion depuis des mois, comme l’a révélé récemment un site marocain de référence, souvent cité comme source par des journaux étrangers.
Ce constat jette une ombre sur le sérieux du travail législatif. Comment parler de réformes structurelles, d’élaboration de politiques publiques ou de défense des intérêts des citoyens si ceux censés les représenter ne sont même pas présents dans l’hémicycle ? Le malaise devient palpable et pousse à interroger les fondements mêmes du lien entre élus et électeurs.
Les justifications sont souvent les mêmes : surcharge d’agenda, déplacements, obligations locales… Pourtant, dans un État de droit, un mandat électif devrait être une responsabilité à plein temps. Le Parlement ne peut se résumer à une scène de visibilité politique épisodique.
Cette défaillance récurrente questionne également le rôle des partis politiques. Sont-ils incapables d’imposer une discipline interne ? Ont-ils abdiqué leur rôle d’encadrement et de contrôle de leurs élus ? Les mécanismes de sanction existent, mais leur application reste rare, voire inexistante.
Enfin, c’est la confiance des citoyens dans les institutions qui en pâtit. L’abstention grandissante lors des élections et le désintérêt croissant pour la chose publique trouvent ici une explication tangible. Quand l’exemplarité fait défaut au sommet, l’apathie gagne la base.
Alors, faut-il repenser le statut du parlementaire ? Imposer la transparence sur la présence et le travail accompli ? Introduire des sanctions financières ou politiques en cas d’absentéisme chronique ? Ces pistes sont sur la table, mais nécessitent une volonté politique que beaucoup redoutent d’activer.
Dans une démocratie véritable, représenter ne se limite pas à être élu, mais à être présent, actif, responsable. L’hémicycle vide devient, malgré lui, le miroir d’un vide plus profond : celui du sens de l’engagement politique.